Conférence autour du thème : “Les poèmes sataniques d’Abû Nuwâs” – 03 juin 2025

26/05/2025

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Le Département des Lettres de l’Académie tunisienne des sciences, des lettres et des arts, « Beït al-Hikma », a organisé, le mardi 03 juin 2025, une conférence autour du thème «Les poèmes sataniques d’Abû Nuwâs».
La conférence, donnée en langue arabe par le membre de l’Académie Pr Mabrouk Mannai, s’est penchée sur la question des « Iblissiyyat » ou « poèmes sataniques », qui désignent des poèmes dans lesquels Ibliss (Satan) occupe une place marquante et significative, tant par l’importance de sa présence que par la nature de celle-ci.
Cette question suscite l’intérêt, non seulement en termes d’analyse de la source « satanique » de la poésie arabe, mais également en vue d’étudier l’invocation d’Ibliss par Abû Nuwâs dans le versant frivole et léger de son œuvre poétique (poèmes d’ivresse, d’amour et de débauche).
Abû Nuwâs y attribue à Ibliss des « missions » bien précises, ce qui caractérise la singularité et l’originalité de ce poète.
Ces aspects « sataniques » dans la poésie d’Abû Nuwâs incarnent une révolte contre les valeurs religieuses et sociales de son époque, le califat abbasside. Il érige le plaisir sensuel, tel que le vin, les éphèbes (ghilmân) et les femmes, en finalité de l’existence. Il remplace les symboles religieux par des images terrestres : le paradis par le vin, les houris par les chanteuses. N’hésitant pas à afficher son libertinage et à transgresser les interdits, il fait une satire de la repentance et de la piété, et pointe l’hypocrisie sociale.
Son attitude est parfois assimilée à celle d’Iblis, non comme symbole du mal absolu, mais comme figure de la désobéissance face à l’autorité imposée. Ces « iblissiyyat » ne relèvent pas tant de l’impiété (zandaqa) que d’un désir de liberté et d’émancipation du joug de la religion, faisant d’Abû Nuwâs un poète existentialiste avant l’heure.
Abû Nuwâs a utilisé les symboles du vin et d’Iblis comme moyens d’expression artistique pour traduire sa vision existentialiste et sa critique des valeurs dominantes. Son œuvre poétique repose sur une déviation esthétique et une libération des cadres moraux rigides, en faveur d’un horizon artistique plus vaste et plus rebelle. Cette liberté artistique reflète, par ailleurs, la grande effervescence de la créativité artistique et littéraire et la liberté intellectuelle et culturelle relative de l’époque abbasside, surtout dans ses premiers temps.
L’événement s’est tenu au Palais de l’Académie, sis à Carthage-Hannibal.